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Polyptych
Polyptych
Polyptych © LFKs / Bernd Lintermann


Polyptych est la toute dernière évolution des retables médiévaux : Les Pères de L'Église de Michael Pacher à Munich, le Polyptyque du Jugement dernier de Rogier van der Weyden à Beaune, le Retable d'Issenheim de Matthias Grünewald à Colmar et L'Agneau Mystique de Jan et Hubert Van Eyck à Gand, pour ne citer que ces quatre chefs-d'œuvre.

Il n'est pas rare que des artistes vidéo s'essaient à architecturer leurs compositions selon ce modèle, remplaçant le retable par l'écran multiple et la peinture par l'image mobile. Polyptych est d'un tout autre profil.

Alors que les retables se pliaient pour des raisons de protection pendant leur transport, la rotation, le pli des différents vantaux du Polyptych sont au cœur de l'œuvre et deviennent le moteur de son expression. Par une relation unique entre le spectateur et l'objet d'art, de l'ordre du tactile et de la préhension, l'œuvre évolue au gré de ces pliages successifs.

L'histoire de l'art est la passion de l'histoire des techniques. L'innovation technique s'offre à l'art, mais aussi exige de lui les mutations par lesquelles à la fois il devient et demeure toujours capable de décrire et réfléchir les sociétés humaines, dont il représente en même temps l'origine et le devenir, dont il manifeste la continuité radicale, alors même qu'il renouvelle sans cesse ni délais les formes d'une révélation de nos métamorphoses.

Les grands retables de la fin du Moyen Âge européen sont ainsi nés de l'agrégation d'une maîtrise artistique acquise sur des siècles et d'un progrès technique gagné dans une sorte de bond formidable, dont la Renaissance fut le seuil. Les polyptyques à panneaux peints et mobiles articulèrent pour la première fois un langage artistique constitué des variations de la mise en relation de multiples images entre elles. Le progrès fulgurant des techniques dans un monde dont le mouvement s'était soudainement accéléré, aussitôt, rendit l'art capable de décrire ce vaste mouvement du monde par celui des images.

Avec ses huit écrans vantaux plasma dont les mouvements et positions que leur impriment les spectateurs recomposent en permanence les images, leur montage, le sens et la sensation qu'elles produisent, le projet Polyptych, résultat d'une recherche sur les conditions de l'image et du son interactifs actuelles, entend servir à la fois l'innovation technique qu'il réalise et la grande et très ancienne tradition esthétique que, ce faisant, il appelle et remonte.
Parce qu' à travers ce projet nous sommes désireux de valoriser tout autant les innovations actuelles, qui lui donnent une forme, que celles du passé, qui lui donnent un sens, tout ce qui du Polyptych n'aura pas nécessité d'être nouveau, sera clairement référé à la tradition du retable. C'est ainsi notamment que les images du Polyptych seront réalisées selon les principes formels de deux inventions du XVIème, siècle des grands retables : le portrait et le paysage.

Projet en préparation depuis janvier 2006, en collaboration avec Bernd Lintermann, directeur de l'Institut de l'image au ZKM.