La structure textuelle du livret sera fondée sur un système de réitération. Elle donnera et "reprendra" au spectateur, neuf différentes versions consécutives du bain de Diane. Variations de narration, d'interprétation, d'orientation, de point de vue, de questions, de sens, d'écriture enfin.
Les dieux de l'époque polythéiste apparaissent et disparaissent sans cesse, toujours métamorphosés, transfigurés dans une infinité de corps. Cette prolifération et cette évanescence empêchent celui qui la découvre, et à qui elles donnent la faculté de voir, d'identifier avec certitude la divinité qui s'est présentée à lui, et plus encore de la retenir. C'est la répétition qui authentifie le multiple, accorde à l'ensemble le statut de théophanie.
Pour écrire aujourd'hui la découverte d'une apparence de Diane par Actéon et cette apparence mise à nue, par lui ou par elle, nous appelons à la réitération. Nous souhaitons un système de variation qui, en proposant une infinité d'éléments du couple raisonnement / description, multiplie les interprétations et le sens. Pas d'imposition donc : le mythe, la question du regard restent ouverts.
Neuf auteurs français sont invités à écrire chacun une version du mythe, à y développer un raisonnement sur la question de la vision que pose celui-ci. Cette invitation est lancée à :
Jean Baudrillard,
Jean-Paul Curnier,
Bernard Noël,
Surya,
Julien Blaine,
André-Pierre Arnal,
Henri-Pierre Jeudi,
Marcel Moreau,
Francis Marmande,
Jean-Loup Pivin.
Que voulait voir Actéon regardant Diane et qu'a-t-il vu... que vit Diane dans les yeux du chasseur qui l'observait ? Donner des réponses à ces questions, c'est aussi tenter d'en résoudre une autre, tout aussi problématique, puisque parler du statut de l'image ne peut se faire sans évoquer celui de la faculté de voir.
Qu'est-ce que Voir...
La vision, l'image, la contemplation, le voyeurisme, l'extase et la perversion, l'érotique, la pornographie et le désir, l'expérience impossible de l'oeil, du corps idéal..., chacun des neuf écrivains fixera librement à travers le récit de la perdition d'Actéon, la nature et l'étendue de ses propositions.
Les neuf parties, courtes (deux à trois feuillets) seront réunies en un livret distribué aux spectateurs qui en pourront avoir lecture avant et pendant l'évocation scénique correspondant à chacune des variations. Sur scène, des fragments du livret seront visuellement repris sur différents supports intégrés à l'action (cinéma, vidéo, relief...). Sur scène donc, le texte ne sera pas supporté par le chant mais apparaîtra encore construit dans le corps de la lettre, la pensée elle-même sera traitée comme une matière. Matière à lire, matière à voir. |